ANTITHESIS
Type | Set of cruises |
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Dates | 20/11/2013 - 20/05/2016 |
Chief scientist(s) | MARCAILLOU Boris , KLINGELHOEFER Frauke , LEBRUN Jean Frédéric |
Project manager | MARCAILLOU Boris |
DOI | 10.18142/242 |
Objective | La campagne Antithesis avait pour objectif principal d'étudier les caractéristiques structurales, tectoniques et thermo-mécaniques de la plaque océanique Atlantique et de la marge des Petites Antilles du Nord impliquées dans la subduction Antillaise. Une attention toute particulière devait être portée aux caractéristiques du contact interplaque, la sismicité et la genèse des grands séismes de subduction. Le degré de couplage interplaque est un processus co-contrôlé par la rugosité de l'interplaque (aspérités structurales), la distribution des températures le long de l'interplaque, la quantité de sédiment et la pression fluide dans le chenal de subduction ainsi que la vitesse d'enfouissement de la plaque plongeante. La nature et les structures du front de la plaque chevauchante ainsi que le développement d'un prisme d'accrétion contribuent également aux variabilités latérales de ce couplage. Ces caractéristiques interviennent également dans l'établissement de barrières à la propagation de la rupture co-sismique et dans le déclenchement des séismes lents superficiels tsunamogènes. Etudier le potentiel sismogène d'une marge convergente et le risque sismique associé nécessitait donc une approche intégrée de ces caractéristiques structurales et thermo-mécaniques profondes. La marge des Petites Antilles présente des spécificités qui la rendent particulièrement intéressante pour l'étude de ces phénomènes en raison de l'évolution latérale du contexte géodynamique et de l'expression sismologique : - La subduction, frontale au sud devient fortement oblique au nord induisant nécessairement une évolution 3D, méconnue à ce jour, du slab. Des rides topographiques (Tiburon, Barracuda) et des failles transformantes Atlantique (15-20, Vidal) entrent en subduction sous la marge (Figure 1). La plaque supérieure est hétérogène pétrologiquement et structuralement. Enfin, les fortes variations latérales de remplissage sédimentaire de fosse et la présence de réseaux de failles et d'échappement fluides dans ce remplissage, suggèrent une forte hétérogénéité des caractéristiques thermo-mécaniques des sédiments entrant en subduction. Figure 1: Carte bathymétrique des Petites Antilles du Nord. Malgré l'absence d'image de structures décrochantes, le décalage entre les vecteurs glissements des séismes (flèches blanches) et les vecteurs déplacements d'Euler (flèches noires) suggère un partitionnement de la déformation notamment marqué par l'échappement du front de la marge vers le NO (flèches jaunes). Le passage d'Anegada s'étend du Bassin de Sombrero (BS) au Bassin de Whiting (BW). La ligne de subduction est marquée par la Fosse des Petites Antilles (FPA), la Fosse de Porto Rico (FPR) et la Faille Nord Hispaniola (FNH) respectivement. - Parallèlement, la distribution des séismes le long de la marge, telle qu'elle est localisée par les réseaux terrestres, semble être hétérogène, alternant des zones de gap et d'amas sismiques (Figure 2). Les données géodésiques font par ailleurs état d'un faible glissement interplaque dont l'interprétation en terme de degré de couplage interplaque ne fait pas consensus. La relative quiescence historique, avec un seul grand séisme historique répertorié en 1843 (Mw = 7.5-8), a faussement favorisé l'impression d'un faible risque sismique. Les ravages du séisme du 26/12/2004 (Mw = 5) ont montré combien cette interprétation était erronée. Figure 2: Distribution de la sismicité sur la marge Nord Antillaise avant 2014. Chaque séisme est représenté par un rond dont la couleur marque la profondeur et la taille la magnitude. Les mécanismes au foyer caractérisent les séismes de Mw>5.5. L'ellipse marquent la zone de rupture du séisme de 1843. BS : Bassin de Sombrero, BW : Bassin de Withing, PA : Passage d'Anegada.
Dans le détails les principaux objectifs des campagnes Antithesis étaient les suivants : 1/ Nature de la croûte plongeante. La résistance et teneur en eau de la croûte plongeante sont des facteurs clés du transfert des contraintes de la plaque plongeante vers la plaque supérieure. La déformation tectonique et l'activité sismique de la zone de subduction en dépendent. La zone de subduction des Petites Antilles est l'une des rares au monde à voir la subduction d'une croûte formée le long d'une ride medio-oceanique à accrétion lente. Ce type de croûte présente classiquement une forte hétérogénéité de nature avec des zones formées des 2 couches classiques Basaltes/Gabbros et des zones principalement ou partiellement composées de roches mantelliques exhumées et serpentinisées. Ces deux types de croûtes ont des comportement rhéologiques très différents et la serpentinisation d'une croûte ultramafique est un moyen reconnu d'introduire une très grande quantité de fluides dans la zone de subduction. L'objectif était donc de caractériser la nature de la croûte plongeante sur la base de l'imagerie profonde et des vitesses de propagation des ondes. Nous nous sommes donc tout particulièrement intéressés aux circulations fluides possiblement liées à la subduction des serpentinites et leur impact potentiel sur la déformation tectonique et la sismogenèse. Les données de flux de chaleur devaient ainsi permettre de vérifier l'ampleur de ces circulations hydrothermales. 2/ Géométrie du slab. La géométrie générale de la zone de subduction et le pendage du slab notamment sont des paramètres clés de l'étude du transfert des contraintes de la plaque plongeante vers la plaque chevauchante. Ils contrôlent en partie la friction interplaque et la déformation tectonique à long terme ainsi que le couplage interplaque et l'activité sismique à court terme. D'un point de vue thermique, ce pendage est déterminant sur l'extension de la gamme de température (60-450°C) favorable au glissement sismogène du contact interplaque. Dans les Petites Antilles du Nord, la forte convexité de la subduction et l'obliquité croissante de la convergence poussent à suspecter une variation du pendage et une géométrie complexe du slab, une ou plusieurs failles de déchirement et une limite de micro-plaque dans le passage d'Anegada (Figure 3). Figure 3: Géométrie générale du slab du segment des Petites Antilles du Nord. A : Antigua, B : Barbuda, D : Dominique, iV : îles Vierges G : Guadeloupe, M : Martinique, PA : Passage d'Anegada, PR : Porto-Rico, SM : Saint Martin et ZD : zone de déchirement. L'objectif était donc d'Imager les variations géométriques du slab et de discuter l'impact sur le transfert des contraintes de la plaque plongeante vers la plaque chevauchante de la variation latérale du pendage.. 3/ Déformation tectonique de la marge et partitionnement de la déformation Par mimétisme avec des analogues célèbres, Sumatra par exemple, des études ont proposé que la marge Nord des Petites Antilles subissent un partitionnement de la contrainte en raison de sa forte convexité et de l'obliquité de la subduction. Ce partitionnement devrait impliquer des failles décrochantes de grande dimension, accommodant la composante parallèle à la marge de la convergence des plaques; failles dont malheureusement aucune imagerie n'avait pu attester l'existence. Les études géodésiques ne montrent pas non plus de mouvements de lanières crustales, tels qu'observés dans les marges partitionnées. L'objectif était donc de questionner l'existence de ce partitionnement de la contrainte en imageant la surface et la structure profonde de la zone la plus courbe de la marge : les Petites Antilles du Nord (Figure 1). Il s'agissait en particulier d'étudier 1/ le Passage d'Anegada et d'un éventuel segment Oriental, en position avant-arc, 2/ l'extension vers le sud du système de failles décrochantes de Bowin et de Bunce, bien connues au large de Porto Rico, 3/ du lien possible entre ce partitionnement et l'ouverture des bassins en V de l'avant-arc et 4/ de rechercher d'éventuels témoins tectoniques distribués et de petite taille pouvant suggérer un partitionnement diffus de cette contrainte à l'échelle de la marge. 4/ Gap sismique dans les Petites Antilles du Nord : Mythe ou réalité? La relative quiescence sismique du segment de marge des Petites Antilles du Nord qui s'étend d'Antigua au Passage d'Anegada, comparativement aux amas sismiques des Iles Vierges au Nord et des Antilles Centrales au sud, a favorisé l'idée que ce segment était caractérisé par un gap sismique (Figure 2). Toutefois, il est à noter que ce segment est également aussi celui où les sismomètres terrestres sont les plus anciens, les plus clairsemés et les plus éloignés de la zone source des séismes majeurs. Il est donc légitime de se demander si le faible nombre d'évènements détectés dans les Antilles du Nord est le signe d'un gap sismique ou d'un biais instrumental. Seul le déploiement d'un réseau de sismomètre sous-marin pourra résoudre le problème de l'éloignement des Iles des zones sources de séismes majeurs. Grâce à ce déploiement nous ambitionnions de vérifier si le gap sismique était réel, notamment pour les séismes de faibles magnitudes et de définir les structures actives qui abritent cette activité. |