1. Imagerie de la structure fine jusqu'au socle par SMT et segmentation le long de l'arc
Je pilote moi-même ce projet et prépare une présentation pour l'EGU 2010. Ces données auraient dues être l'objet de la thèse de l'étudiante que j'avais eu en stage de recherche M2 pendant la campagne et qui avait décroché une bourse mais qui a préféré commencer par avoir une expérience dans le domaine professionnel avant de se lancer dans une thèse. La bourse qui n'a pu être conservée pour elle a été attribuée à une autre thèse.
La cible de cette étude porte sur la limite updip de la zone de contact entre la croûte avant-arc et la croûte océanique qui correspond en première approximation à la limite updip de la portion sismogénique de l'interplaque de subduction. La géométrie de cette grille (Fig. 1, profils en rouge) a été construite sur la base des résultats d'imagerie sismique de la précédente campagne SISMANTILLES. Cette grille consiste en un ensemble de 7 longs profils «strike-line» parallèles à la subduction (300 km de long, espacés de 15 km) et de 12 profils perpendiculaires «dip-lines» (150 km de long, espacés de 25 km). J'ai organisé le traitement de tous ces profils à bord, jusqu'au stack et migration temps avec une vitesse de 1500 m/s avec le logiciel Geovecteur / Geocluster de la CGG Veritas.
La représentation de ces 12 transects révèle le socle au toit de la croûte avant-arc avec le pendage caractéristique vers la fosse, jusqu'à des distances de 160-190 km de l'arc volcanique et jusqu'à 5s temps double sous le fond de mer. Au-delà de la zone de transition entre le bassin avant-arc profond et le prisme d'accrétion, le toit de la croûte océanique et le décollement sont imagés avec le pendage caractéristique vers l'arc jusqu'à 70-80 km du front de déformation et jusqu'à 6-7 s temps double sous le fond de mer avant de le perdre dans le 1er multiple du fond de l'eau (12-15 km de profondeur). Avec deux des profils de la 1ère campagne, nous disposons de deux profils supplémentaires allant jusqu'au front de déformation (Fig. 2). Un résultat de premier ordre est la très grande variation dans le domaine avant-arc de la topographie de son socle d'un profil à l'autre, autrement dit le long de la subduction. Un deuxième résultat de premier ordre porte sur les structures révélées par migration profondeur avant-sommation attestant de la déformation active du domaine avant-arc. Ce traitement a été réalisé par Anne Bécel à l'IFM GEOMAR sur des profils choisis (Fig. 2, profil E et L) pour leur disposition dans le prolongement des deux rides asismiques portées par la lithosphère océanique et subductant de manière oblique par rapport à la direction de convergence.
Le travail d'interprétation en cours permettra de documenter pour la première fois la déformation de la croûte avant-arc elle-même en réponse à la subduction de reliefs portés par la plaque plongeante. Cette segmentation de la marge sera à discuter en regard de la sismogénèse.
2. Structure sismique 2D à l'échelle de l'arc
Les deux profils de tirs réalisés pendant la campagne TRAIL (R/V Merian, PI Flueh) longs de 280 km recoupant tout l'arc sont en cours d'étude (Fig 1, profils en bleu). Celui du nord, entre la Guadeloupe et la Dominique, est traité à GEOMAR par un étudiant en thèse sur ces données (W. Weinzierl). Celui du sud, entre la Dominique et la Martinique, est traité à GeoAzur par un étudiant en thèse avec Audrey Galvé et Philippe charvis (M. Evain).
Ma contribution est de participer à la comparaison de chacun de ces profils avec les profils SMT coïncidents ainsi qu'avec les résultats de modélisation de la campagne précédente (thèse Estelle Roux, 2007). Une comparaison entre les deux profils est en cours de préparation pour l'EGU 2010.
3. Inversion tomographique des tirs enregistrés par le réseau d'OBS
Tous les tirs ayant été enregistrés par les OBS (Fig. 1, profils en rouge et mauve), une inversion tomographique 3D des temps de 1ères arrivées complète la vue 2D que l'on a à partir des profils sismiques. Ce jeu de données a été partagé en deux sous-ensembles : la partie sud, enregistrée par des OBS du parc GeoAzur est tout naturellement réalisée par Mikael Evain en thèse dans ce laboratoire et sur ce sujet. La partie nord est réalisée au laboratoire sous ma responsabilité dans le cadre de l'ATER suivi d'un postdoc de quelques mois de Gaye Bayrakci. Nous utilisons l'approche développée dans le cadre de sa thèse sur la Mer de Marmara, où les variations topographiques du socle qui atteignaient 7 km sont ici doubles (15 km).
Une première étape est en cours de réalisation et consiste en l'élaboration d'un modèle a priori pertinent en 3-D, par l'implémentation des connaissances sur la géométrie du socle à la fois du domaine avant-arc et de la croûte océanique à partir de l'interprétation des profils MCS (Fig. 1, coupe du bas).
Figure 1 : Plan de position de la campagne SISMANTILLES 2.
Figure 2 : Trois profils allant jusqu'au front de déformation (L, K, Gua_sud) et montrés ci-dessous. Les couleurs du profil Gua_Sud de la campagne de 2001 proviennent du modèle de réfraction de la thèse d'Estelle Roux converti en temps double et superposé au profil SMT. Le profil E montré est le résultat de la PSDM.
4. Recherche des conditions d'observation de signaux transitoires de zone de subduction sur le réseau d'OBS
Sur l'ensemble des 80 OBS couvrant la zone, nous avons pu réunir 24 sismomètres fond de mer large-bande, un déploiement probablement réunissant l'un des plus grand nombre de capteur de ce type. L'objectif est d'essayer d'y détecter éventuellement des signaux transitoires dans l'enregistrement continu de ce réseau dense d'OBS, du type trémors non-volcaniques et séismes lents. Il s'agit de ceux récemment détectés au Japon et dans la région des Cascades, qui sont discutés en relation avec l'activité de fluides dans la région de l'interplaque et qui pourraient dans certains cas constituer des signaux précurseurs de méga-séismes.
Nous devons à la fois faire face à la recherche de tels signaux en domaine marin, à la diversité des spécificités techniques des capteurs et à la diversité géologique des sites occupés. Pour pouvoir discriminer entre le signal qui pourrait être identifié comme provenant de la zone de subduction et signaux dus à l'environnement marin, Anne Bécel a développé dans le cadre de son postdoc au CSIC Barcelone un protocole d'analyse de tous ces signaux en temps fréquence (sur matlab plutôt que PQLX) de toutes les composantes corrigées de la réponse de l'instrument, en vitesse et en accélération. Face à la très grande quantité de données, elle s'est concentrée dans un premier temps sur les 10 OBS large-bande de l'AWI et aux 3 du parc INSU/IPGP (Fig. 1, carrés bleus et orange).
Il est très vite apparu que l'étude du bruit lui-même pourrait apporter un regard nouveau sur les interactions entre les processus océaniques et atmosphériques avec la terre solide.
5. Localisations des séismes locaux
Tous les enregistrements ont été dépouillés et des localisations préliminaires réalisées. Les premiers résultats seront présentés à l'EGU 2010. Là aussi en raison de la taille de la zone d'étude, le jeu de données a été partagé en deux sous-ensembles : la partie sud, enregistrée par des OBS du parc GeoAzur a été étudiée par Mario Ruiz dans le cadre de son postdoc à GeoAzur. Je m'occupe moi-même de la partie nord avec Martine Sapin de l'équipe de sismologie qui a réalisé tous les pointés.
Les premiers résultats montrent que la partie sous le prisme d'accrétion est silencieuse. Seule la partie profonde de la zone de contact entre la croûte avant-arc et la croûte océanique montre une activité sismique. Les localisations et interprétations nécessitent des contraintes sur la structure sismique profonde et seront discutées par rapport aux interfaces majeures imagées. Les corrections de sédiments et de boue sous chaque OBS sont indispensables pour ne pas se tromper de 10 km en profondeur sur les hypocentres.
Une inversion conjointe tirs et séismes sera ensuite réalisée en complétant le modèle 3-D obtenu de vitesses d'ondes P par son équivalent en Vp/Vs non seulement ces données nouvelles mais aussi celles de l'expérience pilote SISMANTILLES et d'OBSISMER. En ce qui concerne l'activité micro-sismique, il est toujours envisagé d'entamer la réalisation de modèles thermiques quasiment inexistants dans cette région, pour la discussion des relocalisations réalisées et des mécanismes au foyer.