La faible largeur de la ride de Nouvelle-Calédonie (~100 km), sa géomorphologie et sa géologie, ainsi que les données disponibles sur les pentes des bassins adjacents, font de cet objet une cible particulièrement pertinente pour caractériser les liens terre-mer entre les limites de séquence (c'est-à-dire les surfaces d'érosion aériennes et leurs prolongations au sein des bassins sédimentaires), leurs relations avec les variations à long terme du niveau marin et le fonctionnement des failles qui découpent les marges continentales. Une étude intégrée des relations entre morphogenèse, sédimentation terre-mer et tectonique se justifiait d'autant plus aux vues des résultats récemment obtenus à terre et en mer par les équipes de Géosciences du centre IRD de Nouméa.

La thèse de Violaine Chevillotte (2005) a permis de poser les bases d'un schéma d'évolution géomorphologique à long terme de la Grande-Terre basé sur la distribution des surfaces d'aplanissement régionales et de leurs relations avec les séquences sédimentaires fluvio-deltaïques. La thèse de Benoît Flamand (2006), basée sur l'analyse morphobathymétrique fine de la pente externe du récif barrière, a permis de définir et de cartographier une série de niveaux repères marqueurs d'abrasions marines ou d'abandon de constructions coralliennes, ainsi que de larges reliques aplanissements profonds comparables par leur ampleur aux surfaces latéritiques reconnues à terre. Plus récemment, une campagne de dragage avais permis d'échantillonner les terrasses et les glacis reconnus par Flamand (2006), notamment au droit des sites portant les séquences fluviodeltaïques des côtes de la Grande-Terre (Pelletier et al., 2006). Ces échantillons ont été datés, en 2007, par biostratigraphie.

Sur ces bases, la campagne NEOMARGES avait pour but d'imager au moyen de la sismique réflexion, à travers le lagon et l'escarpement de la marge de la ride, les relations entre (1) les surfaces repères et les formations fluviodeltaïques reconnues à terre, (2) les formations géologiques sous-jacentes aux formes identifiées et draguées sur les pentes externes du récif barrière, (3) les séquences sédimentaires des bassins adjacents et (4) les failles jalonnant la marge. Le choix du N/O ALIS embarquant une sismique multitrace légère avec source suffisante (canon à air et compresseur) se justifiait par le faible tirant d'eau du navire et devait permettre d'acquérir, pour la première fois et avec une bonne pénétration (jusqu'à 2 s temps double), des lignes sismiques continues depuis les pentes de la marge (1200-1000 m de profondeur) jusqu'à la côte à travers les passes du récif barrière. Ces lignes complètent ainsi les acquisitions antérieures qui ont permis de définir la géométrie et la structure profonde des bassins jouxtant la ride de Nouvelle-Calédonie (généralement au-delà de 1000 m de profondeur). Cette campagne devait donc permettre de contraindre la géométrie et la structure des corps sédimentaires armant les parties sommitales de la marge de la ride, c'est-à-dire de décrypter l'histoire morphotectonique de la marge du Miocène supérieur au Quaternaire, période encore très mal comprise et/ou faiblement documentée d'un point de vue paléoclimatique et tectonique dans cette partie du Pacifique.