1. Processus géologiques et hydrates de gaz. (Rédacteur : Jean-Paul Foucher & Stéphanie Dupré, Ifremer)

• Le volcan de boue Håkon Mosby.

Les résultats obtenus montrent que la partie centrale (cratère) du volcan de boue Håkon Mosby est un site géologique instable à l'échelle de quelques années, voire quelques mois, comme l'a démontré une comparaison  de levés bathymétriques à haute définition faits en 2003 et 2006 (dont campagne Vicking) (Foucher et al., 2010). Le modèle éruptif privilégié pour la période actuelle repose sur une succession d'éruptions de volume modeste de boue fluide prenant place dans le cratère. Les mesures de flux thermique répétées dans le cratère au cours de la campagne Vicking indiquent que la boue superficielle dans le cratère garde une température élevée de l'ordre de 20°C à quelques dizaines de cm de profondeur, ce qui est interprété par un flux ascendant de fluide chaud chargé en méthane avec des vitesses de remontée de l'ordre de plusieurs mètres par an dans le conduit sous le volcan. Plusieurs sites à émanations de gaz libre (chapelets de bulles de gaz) ont été détectés à la surface du volcan de boue par méthodes acoustiques et/ou à partir des observations vidéo ROV. Cette activité d'émission de gaz libre est instable dans le temps et dans l'espace. L'écosystème est notamment régi par des éruptions de boue fréquentes dans le cratère, un flux permanent d'eau chargée en méthane qui s'atténue du cratère à la zone externe, des émissions locales de méthane sous forme de chapelets de bulles de gaz instables à la fois dans le temps et spatialement.

Fig. Cartes bathymétriqueshaute-résolution du volcan de boue Håkon Mosby acquises en 2003 et 2006 (durant la campagne Vicking) qui nous permettent d'observer les variations spatio-temporelles de la morphologie du fond associée aux activités fluides (Foucher et al., 2010).

• Les pockmarks de la zone Nyegga-Storegga montrent une activité variable d'émissions de fluides. 

Le pockmark CNE03 situé à une profondeur de 722 m sur la pente continentale norvégienne, caractérisé par une cheminée à gaz bien imagée par les levés géophysiques antérieurs, a fait l'objet d'une cartographie bathymétrique et observations ROV particulièrement détaillées pendant la campagne Vicking permettant de décrire trois sites principaux de suintements fluides actifs corrélés avec les hauts morphologiques du pockmark. Les vitesses de suintements sur les sites actifs restent faibles, de l'ordre de quelques cm par an. Les observations Vicking montrent que l'activité des suintements des pockmarks de la zone Nyegga étudiée, même sur les sites les plus actifs, reste modeste. Un modèle conceptuel reliant présence massive d'hydrate de gaz en profondeur (Plaza- Fevola et al., 2010) et activité de suintements de méthane à la surface du pockmark (Foucher et al, 2010 ; Foucher et al. , en révision Marine Geology) a été présenté. Ce modèle suggère une période antérieure (post-glaciaire) d'activité intense, la situation actuelle pouvant être qualifiée de période d'activité modeste.

Fig. Modèle conceptuel du lien entre présence d'hydrate dans les sédiments marins et activité d'émission de fluides froids chargés en HC en fond de mer (Foucher et al., 2011 en révision).
 

2. Communautés faunistiques. (Rédacteur : Karine Olu, Ifremer)

Le volcan de boue Haakon Mosby est caractérisé par une zonation typique des habitats biogéniques et géochimiques depuis le centre apparemment dénué de vie et la périphérie largement colonisé par les polychètes siboglinidés (pogonophores), alosr que la zone intermédiaire est couverte de tapis microbiens dominés par le genre Beggiatoa (Jerosch et al., 2007). Cependant cette dernière étude est basée sur une image très partielle du volcan (seulement 7% de couverture visuelle). Pendant la campagne Vicking, la mise en oeuvre du Module de route du Victor avec la caméra haute sensibilité OTUS a permis d'augmenter sensiblement cette couverture de (30% de la zone sud du volcan), donnant ainsi les bases pour une étude de l'évolution temporelle des habitats. Bien que HMMV a été intensémment étudié depuis 10 ans, avec une très bonne connaissance de l'activité thermique, de la géochimie, et des processus microbiologiques, les communautés faunistiques sont très peu connues à l'exception de la faune de très petite taille (méiofaune)(Soltwedel et al., 2005; Van Gaever et al., 2006), depuis la première description générale basée sur l'observation vidéo et un échantillonnage limité (Gebruk et al., 2003).
Pendant la campagne Vicking notre objectif était de tester l'influence de l'hétérogénéité de l'habitat sur le volcan HMMV sur la structure des communautés de macro- et mégafaune, et de comparer celle des habitats observes sur les pockmarks de la pente de Storrega et de la zone Nyegga. Un survey régulier dédié à la cartographie des habitats a également permis de dénombrer la mégafaune. Un échantillonnage quantitatif des différents habitats (6 en tout) par carottiers lame et aspirateur à faune a permis une analyse précise et statistique de la macrofaune.

• Cartographie et évolution temporelle des habitats du volcan Haakon Mosby.

Le Module de mesure en route du Victor a été utilisé pour la première fois de manière opérationnelle et a fourni outre une microbathymétrie fine du volcan, un jeu de données d'images avec un recouvrement de 30% sur une partie du volcan permettant de distinguer les différents habitats et de dénombrer les organismes vagiles de la mégafaune (poissons par exemple). Ce jeu de donnée est le premier acquis, sur les habitats profonds, suffisant pour permettre une bonne interpolation des habitats par des méthodes géostatistiques (Dorso, stage de M2, 2007) (Fig.3.2.1). Une comparaison avec une cartographie des habitats réalisée en 2003 suggère, malgré un effort d'échantillonnage moindre et un champ de par caméra verticale couleur plus réduit, une variabilité temporelle des communautés biologiques (Olu et al. 2008, Olu et al. in prep.). Cette variabilité est potentiellement liée aux changements dans la morphologie, dus à l'activité du volcan, observés en comparant les cartes haute résolution obtenues les deux mêmes années (Foucher et al. 2010).

Figure 4.2.1a : Cartographie des habitats sur le volcan HMMV à partir des images de la caméra OTUS avec les habitats observés le long des trajets de plongée (21 classes) et les habitats prédits par « krigeage » (9 classes) réalisée avec ArcGIS 9.0. Exemples d'images OTUS, 64 m² environ. a. Champs de siboglinidés (périphérie, en vert sur la carte) ; b. tapis microbiens (zone intermédiaire, en rouge sur la carte). Olu, Fabri et al. in prep.

Afin de progresser dans le traitement de ce type de données, une étude a été menée dans le cadre d'un post- doctorat (Cyril Chailloux, 2008) supervisé en collaboration avec A.G. Allais ingénieure en traitement d'images, afin de rechercher une méthode de segmentation et classification automatique des ces images. Différentes méthodes ont été testées, certaines donnant de bons résultats comme l'analyse de texture (Fig.3.2.1b), cependant sans identifier une seule méthode parfaitement adaptée aux différents habitats (Chailloux et al., 2008). La poursuite de cette étude prévoit d'intégrer les données acoustiques issues du sondeur multifaisceaux afin de rechercher leur potentialité dans la cartographie des habitats et des peuplements. 
Ces différentes approches basées sur le traitement d'image et les systèmes d'information géographique permettront de suivre l'évolution temporelle de quelques structures cibles, tel le volcan Haakon Mosby, dans le cadre du projet européen sur les observatoires fond de mer ESONET (action de démonstration LOOME).

Fig. 4.2.1b : Image de la caméra OTUS originale et image classifiée par l'analyse de texture en 3 classes : tapis bactériens (13% de couverture) en bleu, siboglinidés (23%) en vert et fond uniforme (64%) en rouge (Chailloux et al., 2008).

• Caractéristiques des communautés de macrofaune en relation avec l'hétérogénéité de l'habitat à différentes échelles spatiales.

Plusieurs stages de Master (Decker 2007,2008) ont permis une caractérisation des communautés de macrofaune de différents habitats du volccan HMMV ainsi que des pockmarks de la pente de Storrega et de la zone Nyegga. Une étude incluant également des échantillons d'autres habitats du volcan acquis pendant la campagne allemande ARKXXII a été présentée en congrès (Decker et al. 2009a, Decker et al. 2009b) puis soumis pour publication et tout juste accepté (mars 2011) (Decker et al.2012). Quelques résultats ont également été publiés en relation avec l'analyse de la méiofaune (Van Gaever, Olu et al. 2009) et dans un article général sur les communautés de sources froides étudiées au cours du projet Hermes (Vanreusel et al. 2010). Enfin, les observations et cartographie de la mégafaune sur les pockmarks seront prochainement publiées par Foucher et al. (accepté).
L'ensemble des données d'identification de la macrofaune ont été transmises à la base de données PANGAEA et seront incluses dans une étude globale de la biodiversité des sources froides à l'échelle européenne réalisée dans le cadre du projet Hermione(WP5 biodiversity integration) (Vanreusel et al. in prep) à laquelle nous participons  pour la Norvège (Olu, Decker).

Fig. 4.2.2a.: Habitats échantillonnés pour la macrofaune par carottiers-lame sur le volcan Haakon Mosby

Fig 4.2.2b : Analyse en composantes principales et groupement hiérarchique illustrant le regroupement des échantillons de macrofaune selon les habitats du volcan HMMV et des pockmarks (WhMx : tapis microbiens blancs, GrM : tapis microbiens gris, Scx : champs de Sclerolinum contortum, Sc-S : sur pockmarks de Storrega, Sc-N sur pockmarks Nyegga, Ohx : champs d'Oligobrachia haakonmobiensis, C : centre du volcan, S : sédiment adjacent aux tapis microbiens blancs). Les taxons contribuant de façon significative au groupement des échantillons sont situés à l'extérieur du cercle de contribution (Gastropoda, Isopoda, Polychaeta).

• Analyse du réseau trophique en relation avec l'habitat à différentes échelles spatiales.

A l'échelle du volcan HMMV : 
Une étude basée sur l'analyse des isotopes stables du carbone et de l'azote de 17 taxons de macro- et mégafaune échantillonnés sur les différents habitats (tapis microbiens et champs de polychètes siboglinidés) a fait l'objet d'une présentation en congrès international (Decker et al. 2009) puis d'une publication (Decker & Olu 2010). La variabilité des signatures en carbone selon l'habitat a pu être mise en évidence avec une contribution décroissante de la production chimiosynthétique dans la nutrition de la faune associée depuis le centre vers la périphérie, en relation avec le gradient d'activité en termes d'expulsion de fluides. Les chaînes trophiques sont bien séparées selon les habitats qui abritent des communautés distinctes. En outre, deux chaînes trophiques distinctes semblent co-exister dans l'habitat « tapis microbien », l'une basée sur l'oxydation des sulfures avec une consommation des bactéries filamenteuses des tapis par les gastéropodes Rissoidae et les nématodes, alors que les polychètes Capitellidae, déposivores de surface qui dominent la macrofaune, consomment probablement des microorganismes méthanotrophes, comme cela a été suggéré pour les copépodes. Finalement les poissons Zoarcidae, observés sur et autour des tapis microbiens, ont une signature variable en carbone et azote indiquant un régime trophique diversifié.

Figure : Signatures isotopiques de différents taxons sur le volcan de boue Håkon Mosby. Les boîtes grisées représentent les proies potentielles. Tiré de Decker et Olu (2010)

• Analyse des communautés de méiofaune en relation avec l'habitat à différentes échelles spatiales.

Plusieurs publications décrivent les communautés de méiofaune, en particulier les nématodes en relation avec l'hétérogénéité de l'habitat à l'échelle du volcan HMMV (Van Gaever et al. 2009b) ou sur la marge norvégienne (incluant les pockmarks de la pente de Storrega) (Van Gaever et al. 2010),ainsi que les adaptations des espèces dominant dans les environnements riches en hydrogène sulfuré et pauvres en oxygène (Van Gaever et al. 2009a). Les donnée issues de la campagne Vicking sont également utilisées dans les analyses globales de l'influence de l'hétérogénéité de l'habitat sur la diversité de la faune des sources froides (Cordes et al. 2010) et de celle des nématodes (Vanreusel et al. 2010).
La méiofaune de Norvège et notamment les résultats issus de la campagne Vicking sont inclus dans la thèse de Saskia Van Gaever (Van Gaever 2008)

• Etude comparative de la structure des hémoglobines de polychètes siboglinidés.

Cette étude présentée à plusieurs congrès (Andersen et al.) et publiée (Meunier et al 2010) compare les hémoglobines des deux espèces de pogonophores (polychètes siboglinidés) qui dominent les habitats du volcan HMMV et des pockmarks de la pente de Storrega. Cette étude de biochimie et physiologie corrobore la nouvelle classification phylogénétique des Siboglinidae de cette famille, sur son évolution et sur les adaptations des deux groupes (caractérisés par les deux espèces présentes) étudiés. En effet ce travail a permis de découvrir la présence de deux hémoglobines chez l'une des espèces (le frenulé S. contortum) comme chez les vestimentifères, tandis que O. haakonmosbiensis n'a qu'une seule hémoglobine, comme les pogonophores. La caractéristique de leurs hémoglobines confirme le rapprochement phylogénétique entre frenulés est vestimentifères, mis en évidence par les séquençages moléculaires (Halanych et al, 2005). Une publication à visée écologique est en outre en préparation par Andersen et al.

• Description d'espèces.

De nombreuses espèces nouvelles ont été identifiées par différents taxinomistes qui nous avons expédié les collections. Ces descriptions feront très probablement l'objet de publications spécifiques, ou contribueront à des monographies.

3. Communautés microbiennes. (Rédacteur : Laurent Toffin, Ifremer)

Les communautés microbiennes des sédiments associés à des tapis de bactéries filamenteuses sont souvent dominées par des activités d'AOM (oxydation anaérobie du méthane) couplées à la sulfato-réduction. Les pockmarks sont une structure géologique typique des zones d'émissions de fluides froids, et sont liés à des émissions de fluides au travers de conduits (cheminées à gaz) acheminant le méthane à la surface. Les communautés associées aux sédiments de pockmarks ont été, à notre connaissance, peu étudiées jusqu'alors dans les marges continentales. En raison de la singularité des ces structures géologiques de fonds de mer, nous nous sommes posés les questions suivantes: (i) existe-t-il des communautés microbiennes d'ANME (méthanotrophe anaérobie) et de sulfato-réductrices (SRB) dans des sédiments de pockmarks ?, (ii) quelle est la diversité et la distribution des communautés Archaea méthanotrophes anaérobies et SRB ?, et (iii) les communautés microbiennes probablement impliquées dans les processus d'AOM sont-elles comparables ou significativement différentes des communautés d'AOM rencontrées dans des sédiments de volcans de boue, de subsurface, ou encore d'autres écosystèmes abritant ce type de processus ? Dans le but d'étudier la diversité des communautés microbiennes dans des sédiments de pockmark, nous avons échantillonné des sédiments associés à un tapis microbien de couleur marron vert du pockmark G11 de la zone Nyegga, en Mer de Norvège. Ce pockmark est associé à des flux de fluides modérés, émettant probablement du méthane. De la faune ainsi que des croûtes carbonatées sont associées à ce pockmark, suggérant que les flux de fluides seraient plus modérés que dans les sédiments associés aux tapis de couleur orange du volcan de boue Napoli. La distribution des communautés Archaea a été déterminée par la méthode de PCR-DGGE. La fraction des Archaea métaboliquement actives a été analysée grâce à la construction d'une banque de clones basée sur les gènes codant pour l'ARNr 16S dérivés d'extraits d'ARN. Les gènes métaboliques spécifiques mcrA et dsrB ont été étudiés pour mettre en évidence des communautés d'ANME (et méthanogènes) et de SRB. Des séquences affiliées aux méthanogènes appartenant au genre hydrogénotrophe Methanogenium ont été détectées dans des cultures d'enrichissement à partir de sédiments de surface du pockmark G11 de la zone Nyegga. La présence simultanée de BSR et de méthanogènes hydrogénotrophes dans les couches sédimentaires est énigmatique, puisque les BSR sont plus efficaces que les hydrogénotrophes pour utiliser l'Hydrogène. Il est donc possible que les hydrogénotrophes présentes dans des sédiments riches en sulfate, utilisent d'autres sources d'énergie  alternatives, qui sont associées à une croissance plus lente, mais qui ne sont pas utilisées par les BSR, comme le formate par exemple. Des séquences affiliées aux Methanosarcinales, principalement composées de méthanogènes méthylotrophes, ont aussi été détectées dans les sédiments du pockmark G11 de Nyegga. Dans les sédiments du pockmark G11 de la zone Nyegga, nous avons détecté des séquences affiliées aux ANME appartenant aux trois clades identifiés connus (ANME-1, 2 et 3). Les inventaires des gènes codant l'ARNr 16S obtenus par RT-PCR ont mis en évidence que les membres des ANME-2 étaient métaboliquement actifs dans les sédiments du pockmark G11 de la zone Nyegga. La majorité des séquences obtenues ont une forte similarité avec les ANME décrits comme des Archaea oxydant le méthane. En effet, le contenu en ribosome est généralement plus élevé dans des cellules métaboliquement actives, ainsi, il est probable que les ANME soient actives et dominante dans les échantillons de sédiment de Nyegga. Cette étude a donc fait l'objet d'une publication (Lazar et al., 2011).

Dans les zones d'émissions de fluides froids, des vers de la famille des Siboglinidés sont responsables de la bioturbation des sédiments, qui entraîne une augmentation de la pénétration de l'oxygène dans les sédiments. De plus, les vers ont la capacité d'éliminer du méthane, du sulfate, des sulfures et de l'oxygène par diffusion passive à travers leurs tubes. L'activité biologique des vers modifie donc la disponibilité en accepteurs d'électrons (sulfate, oxygène), qui a sûrement un impact sur la répartition des communautés microbiennes dans les  sédiments associés aux vers. Les communautés sédimentaires associées à des vers tubicoles ont été peu caractérisées, puisque les études se focalisent essentiellement sur les bactéries symbiotiques chez ces animaux. Dans le but d'analyser la diversité de ces communautés sédimentaires, nous avons échantillonné des sédiments peuplés par des "patchs" peu denses de vers tubicoles des Siboglinidés appartenant aux genres Oligobrachia haakonmosbiensis et Sclerolinum contortum dans la zone de glissement sous-marin Storegga, en Mer de Norvège. La présence des vers tubicoles indique a priori l'existence de flux de fluides peu intenses. Pour accéder à la diversité des communautés Archaea dans des sédiments associés à des vers tubicoles, nous avons analysé la distribution de la fraction de la communauté Archaea métaboliquement active via la construction de banques de clones basées sur les gènes codant l'ARNr 16S dérivés d'extraits d'ARN. Cette deuxième étude a fait l'objet d'une publication dans Microbiology Ecology (Lazar et al., 2010).
 

4. Carbonates authigènes. (Rédacteur : Catherine Pierre, UPMC)

Les carbonates authigènes associés aux cold seeps de la zone Storegga-Nyegga et du volcan de boue Hakon Mosby sont présents sous forme de croûtes d'épaisseur centimétrique à décimétrique présentes irrégulièrement sur le fond marin et en subsurface, ainsi que sous forme de concrétions dispersées dans le sédiment. La plupart des croûtes et concrétions sont de couleur gris-beige et contiennent entre 60 et 93 % de carbonate. Quelques croûtes brun foncé à noir de la zone Storegga ne contiennent que 3 à 5% de carbonate.
La minéralogie de ces carbonates est représentée par la calcite magnésienne qui est associée ou non à l'aragonite et à la dolomite. La pyrite est très souvent associée aux carbonates, la barytine est abondante uniquement dans les carbonates d'Håkon Mosby.
Les croûtes brun-noir de Storegga présentent des valeurs de ¹⁸O (0.52 à 1.98 V-PDB) et de ¹³C (- 5.72 à -1.57 V-PDB) caractéristiques de carbonate marin sans contribution de carbone d'origine méthanique. Cela est d'ailleurs confirmé par les biomarqueurs lipidiques où sont absents les marqueurs spécifiques des archea méthanotrophes anaérobies (ANME).
Les croûtes et concrétions gris-beige sont très appauvries en carbone 13, que ce soit celles de Storegga- Nyegga (-58.3 < ¹³C V-PDB < -31.6) ou celles d'Håkon Mosby (-36.3 < ¹³C V-PDB < -18.0) ; ces basses valeurs de ¹³C indiquent que l'origine de ces carbonates est liée à l'oxydation anaérobie du méthane (AOM). Les biomarqueurs lipidiques contiennent les composés spécifiques des ANME et des bactéries sulfato-réductrices, confirmant que la précipitation des carbonates authigènes est le produit de l'oxydation anaérobie du méthane couplée à la sulfato-réduction. Dans la zone de Storegga-Nyegga, deux niveaux de coquilles de vésicomydés associés à des concrétions carbonatées liées à l'AOM ont été trouvés à 0,9 m et 1,30 m de profondeur et datés à 14930 et 15500 ans BP, ce qui démontre que l'activité des cold seeps était également importante au cours de la dernière déglaciation.

Figure : Photos du fond sur la zone Nyeggea : exemples d'encroûtements carbonatés authigènes (Foucher et al., 2011 en révision).

5. Contributions du groupe d'Antje Boetius (MPI) : microbiologie-biogéochimie.

Données incluses dans les thèses de Janine Felden, Anna Lichtschlag et Stefanie Grünke.