Le bilan synthétique de cette campagne est :
1) une situation hydrologique remarquablement stable pendant 1 mois ¿ coupés d'évènements météos ponctuels, constituant un cadre extrêmement favorable à l'étude des processus biologiques et leur modélisation couplée à un modèle physique (en effet les perturbations de vent et de pluie, n'ont pas eu l'ampleur attendue),
2) un set de données unique par la haute fréquence temporelle de leur acquisition en point fixe (toutes les 3, 6, 12 et/ou 24 heures pendant 1 mois et demi) et la dimension spatiale verticale inégalée jusqu'à présent (0-1000 m) pour des données biochimiques de composition de POM et de DOM (carbone, azote, lipides, substances humiques), et pour la description de la structure des communautés bactériennes, pyto- et zooplanctonique résolues au niveau de l'espèce et de leur métabolisme.

Le potentiel de ces données comme référence pour la Méditerranée Nord-Occidentale est extrêmement fort. La remarquable stabilité de la biomasse (au-delà de la décroissance attendue à cette époque de l'année) mais les flux d'exportation variables, permettent d'évaluer le rôle de la biodiversité sur le contrôle du flux d'exportation.

Pendant toute la durée de la campagne, le Point Central d'observations était localisé au-delà du front Liguro-Provençal et du courant Ligure. Cette assertion est établie par le suivi permanent des propriétés T et S de la couche mélangée et de la hauteur dynamique calculée pour chaque station CTD (dix par jour), par la dérive de la ligne de pièges et une première visualisation des courants ADCP. Cependant, l'apparition d'eau dessalée (S<38.2) indique des intrusions d'eau d'origine côtière, sous la thermocline, dans la tranche 50-150 m, qui ne peuvent être expliquées par l'existence d'un méandre du courant Ligure venant couvrir le Point Central. L'origine côtière de ces eaux est établie grâce aux observations faites sur la radiale côte-large au début de la campagne et en deux stations à la côte en milieu et fin de campagne. L'explication la plus simple repose sur l'existence probable d'instabilité barocline, échangeant de l'eau du large et de l'eau côtière sur une portion restreinte de la colonne d'eau.

Ces intrusions ont momentanément modifié les populations phyto- et zooplanctoniques. Un lien pourra sans doute être établi entre la forte intrusion et les mauvaises conditions météorologiques (pluies côtières et vent) du tout début de campagne. Plusieurs coups de vent, de différentes intensités, durée et direction, ont eu lieu au cours de la campagne, avec des effets sensibles sur la composition et la dynamique du système biologique. En deuxième partie de campagne, la série de coups de vent engendre une forte diminution de la température et l'approfondissement très net de la couche de mélange.

Divers indices montrent que la campagne DYNAPROC 2 à couvert une période de transition saisonnière, avec cependant des caractéristiques hydrologiques et des ressources nutritives (N/P) proches de la  situation estivale. Les sels nutritifs (SN), révèlent la présence de traces de NO₃ et PO₄ en surface, potentiellement limitant illustré par l'activité phosphatase (Nedoma et al. 2007^R). Les stocks de SN et les rapports N/P sont peu variables, traduisant le maintien de condition estivale.

La biomasse phytoplanctonique (TChla) est exceptionnellement élevée (35-40 mg m^-2) en début de campagne par rapport à celle habituellement enregistrée par le service d'observation DYFAMED, puis se stabilise aux alentours de 20-25 mg m^-2. La production primaire est en moyenne de 200 mg C m^-2 j^-1, variant de 400 mg C m^-2 j^-1 en tout début de campagne (soit 50 % de plus qu'habituellement observé) à 100 mg C m^-2 j^-1 en fin de campagne. La diminution générale des stocks (phytoplancton, zooplancton, flux de masse) est retardée (ou accélérée) par différents épisodes (coups de vent, intrusions d'eau côtière). Plusieurs situations trophiques contrastées sont observées. Le nano- et le microplancton dominaient en début de campagne, suivi par une dominance du picoplancton, avec une variation importante et rapide des proportions respectives des Synecchococcus et des prochlorophytes probablement liée aux disponibilités des éléments nutritifs. L'étude de la composition taxonomique du microphytoplancton a également montré un changement d'espèces au niveau des diatomées (dominance des centrales puis des pennales, qui ont des prédateurs différents) (Marty et al. soumise). Les variations qualitatives et quantitatives de la communauté phytoplanctonique se répercutent sur le flux exporté.

 La communauté zooplanctonique a présenté, à plusieurs reprises, des variations de sa composition et de sa biomasse, ce qui se répercute sur la structure et l'activité des communautés bactériennes et la qualité du flux de matière, comme observé dans les autres situations trophiques des campagnes PROPECHE et comme suggéré par la confrontation des données pluridisciplinaires. Un des changements les plus importants s'est produit lors de la première intrusion d'eau côtière, avec un doublement de la biomasse des copépodes et, au contraire, une forte diminution de la biomasse des euphausiacés. Les copépodes ont alors été dominés par des espèces herbivores, alors que l'euphausiacé dominante omnivore a été remplacée par une espèce carnivore. Notons aussi, par exemple, les fortes abondances de mollusques ptéropodes pendant le leg 2, suite à une reproduction active. Les mesures des taux physiologiques de respiration et d'excrétion, effectuées tout au long de la campagne, mettent en évidence la diversité des processus métaboliques au sein de la communauté zooplanctonique.

Un fait remarquable est la variabilité à court terme (quelques jours) des flux d'exportation mesurés par les pièges dérivants et fixes alors que l'on observe pendant la même période une faible variabilité de la biomasse et de la production primaire. Comment à biomasse constante, la biodiversité peut-elle changer le flux ? Dans la zone méso-pélagique, l'augmentation du flux exporté est vraisemblablement liée à la présence d'organismes migrateurs. L'analyse du DOC et des biomarqueurs associés suggèrent des vecteurs d'export de matière dissoute autre que le mélange hivernal. Le rôle de la biodiversité sur la fonctionnalité du système représenterait un contrôle majeur des flux d'exportation.