BICOSE 3

Type Campagne océanographique
Navire Pourquoi pas ?
Propriétaire navire Ifremer
Dates 21/10/2023 - 05/12/2023
Chef(s) de mission CAMBON Marie-Anne ORCID

ETUDES DES ECOSYSTEMES PROFONDS

IFREMER Centre de Bretagne

ZI Pointe du diable

CS 10070

29280 PLOUZANE

+33 (0)2 98.22.43.67

DOI 10.17600/18002399
Objectif

    Cachés au regard des sociétés humaines par une couche d'eau salée de plusieurs kilomètres d'épaisseur, l'Océan profond a longtemps été considéré comme une vaste étendue obscure et glaciale, désertique, parfois peuplée de monstres marins. Pourtant cet environnement est le plus grand biome de notre planète. Couvrant plus de 70% de la surface de la Terre, l'océan profond (> 1000 m) aphotique et sous pression englobe plus de 80% du volume d'eau de mer.

     Longtemps ignoré ou craint, il est aujourd'hui la convoitise des pays développés et émergents de par les ressources qu'il renferme en terme de biodiversité et de richesses minérales. Dans la course au développement, les sociétés humaines pourraient arriver, avec l'essor des nouvelles technologies, à la fin des ressources minérales terrestres émergées, et se tourner vers celles de l'Océan profond, en particulier vers les massifs de sulfures polymétalliques créés par l'activité hydrothermale de long des dorsales. Cependant, ces systèmes et les écosystèmes qu'ils renferment ne sont que très partiellement connus. Il est donc aujourd'hui urgent d'établir, de façon holistique, les bases de connaissances intégrées et solides au regard de la diversité des systèmes géologiques, des habitats profonds, de la biodiversité qu'ils renferment et du fonctionnement de cet ensemble replacé dans un contexte général d'océans ouverts et inter connectés. Pour réaliser cette approche pluridisciplinaire et intégrée il est primordial d'identifier des marqueurs de suivi et d'inter comparaison de ces habitats, tant d'un point de vue géologique, chimique que biologique. Quels sont les critères permettant d'établir le (bon) fonctionnement d'un écosystème ? Comment fonctionne le système Océan profond ? Et de là, comment peut-il réagir et s'adapter face à des modifications, soient-elles naturelles ou anthropiques ?

    Par 3600 mètres de fond sur la dorsale Médio Atlantique, le site TAG, champ ancien et structuré de massifs d'âges allant d'un site actif actuel jusque environ -125 000 ans, et le site Snake Pit jeune et volcanique, sont au coeur de nos études des écosystèmes profonds. Distants d'environ 300 km et séparés par une faille transformante majeure (Kane) plongeant à 6000 m de profondeur et décalant l'axe de la dorsale de 100 km, ces sites présentent des similarités en termes de diversité biologique, posant la question de leur connectivité. Au cours de ces dernières années, nous avons réalisé deux campagnes majeures, permettant d'établir une première base de reconnaissance des habitats sur ces deux champs actifs et de débuter de premières observations sur les zones périphériques. Des données encore partielles nous permettent de commencer à identifier les traits fonctionnels et d'histoire de vie des espèces clés. Une campagne d'exploration sur 600 km de dorsale a permis de relever des anomalies qui indiquent la présence de sites actifs encore non répertoriés entre ces deux sites connus. Ces sites intermédiaires constituent de potentiels relais de dispersion des espèces, point clé de la compréhension globale des écosystèmes et de leurs relations le long de segments de dorsale. Au cours de cette campagne BICOSE3, nous cherchons à établir de façon plus précise :

  1. Le fonctionnement du système géologique qui sous-tend cette activité hydrothermale, depuis plus de 125 000 ans pour TAG.
  2. Des cartes précises de la distribution des communautés à l'échelle des champs actifs à l'aide d'une combinaison de « surveys » optiques haute résolution et d'inventaires des espèces identifiées par des approches de taxonomie intégrative.
  3. La connectivité des espèces clés en prenant en compte l'ensemble des sites actifs, y compris ceux nouvellement identifiés sur ces segments.
  4. Le fonctionnement in situ des holobiontes sur des zones contrastées et au cours du cycle de vie (incluant l'étape clé d'acquisition des symbiontes) à l'aide d'outils dédiés.
  5. Les processus d'installation des nouvelles recrues et l'influence des conditions environnementales sur cette installation à l'aide d'expériences de colonisation in situ déployées sur les sites actifs et inactifs d'âges différents.
  6. Mieux comprendre les capacités sensorielles et d'acclimatation des holobiontes par approches in vivo.
  7. La diversité des communautés microbiennes qui colonisent les massifs fossiles, leur fonction, ainsi que leur implication dans le cycle du carbone et,
  8. Finalement aboutir à une redéfinition les notions de sites actifs et inactifs, prenant en compte le gradient entre les deux extrêmes et la distribution des biotopes et de la biodiversité (micro à macro) au sein du district de TAG.

    In fine, nous souhaitons établir une carte précise à l'échelle d'un segment de dorsale de 600 km, de sites contrastés et de zones inactives, afin d'appréhender de façon holistique le fonctionnement de ces environnements, tant d'un point de vue géologique que biologique. Nous tâcherons d'identifier des marqueurs clés de bon fonctionnement de ces écosystèmes, le long de gradients d'activité, afin d'établir des protocoles d'inter-comparaison à l'échelle globale. Ces études auront l'ambition de répondre aux questions sociétales de protection et de respect de ces biotopes, se basant non seulement sur la biodiversité qu'ils renferment (présence/absence et abondance) mais aussi sur leurs fonctions clés (synthèse, reproduction, détoxication), leur permettant d'être résilients, de s'adapter et d'évoluer face aux changements, naturels ou anthropiques.

Données archivées au Sismer

Plongées