Résultats majeurs partie Habitats
Des prélèvements à l'aspirateur à faune et à la pince ont été réalisés pour identifier les espèces observées par la caméra du HROV Ariane, lors des plongées PL73-02 et PL76-05. Les échantillons ont été conditionnés dans de l'alcool ou congelés. Il s'agit principalement de spongiaires ou de bryozoaires. Les prélèvements couplés aux observations vidéo ont permis de montrer la présence de deux habitats d'intérêt communautaires (Ospar) sur la zone du canyon de Capbreton et la présence d'espèce ZNIEFF :
- Colonies de pennatules et mégafaune fouisseuse » EUNIS A5.361 et A5.362 ;
- Agrégats d'éponges d'eaux profondes » EUNIS A6.62
L'acquisition de photos et de vidéos lors des 5 plongées (Figure 1) avec l'engin télé-opéré HROV Ariane lors de la campagne HapoGé a permis de répertorier dans le canyon de Capbreton divers groupes taxinomiques tels que les scléractiniaires ou coraux durs dont Dendrophyllia cornigera (figure 5A et B) observés sur la Zone Blocs et Penfeld (PL76-05) et des petits champs de Cérianthes (figure 5C) en bordure de falaises (ou ravines) sur cette même zone. Une des grandes particularités géologiques que nous avons pu observer sur les sites « Roches du doigt mordu » (PL74-03) et Potromoncou/Regina (PL73-02), ce sont des strates indurées richement colonisées (figure 5D) par la faune benthique (cnidaires, éponges). La mégafaune fouisseuse comme la famille des Paguridés, des Munididés, des Galathées ou des Néphropidés est particulièrement visible sur les fonds vaseux de ces sites (figure 5E). Parmi la faune vagile, des taxons ont pu être observés ponctuellement sur la Zone Blocs et Penfeld sur des fonds de 190-265 m comme le merlu (Merluccius merluccius), le grondin (Chelidonichthys spp) ou la petite roussette (Scyliorhinus canicula).
Les prélèvements biologiques réalisés à l'aspirateur à faune ou à la pince lors des plongées PL73-02 et PL76-05 ont permis d'identifier les espèces d'éponges (figure 5F et G). En particulier sur la partie supérieure de l'habitat d'intérêt communautaire « Agrégats d'éponges d'eaux profondes » (A6.62), 5 des principaux taxons présents appartiennent à différentes familles : Chalinidae (genre Haliclona et Cladocroce, Figure 5F et G), Axinellidae, Hymedesmiidae et Esperiopsidae. Les prélèvements de Bryozoaires n'ont pas encore été valorisés à ce jour.
Figure 5. Habitats. A. PL76 - Agrégats d'éponges d'eaux profondes » EUNIS A6.62 (blocs rocheux avec du corail jaune Dendrophyllia cornigera et éponges par 185 m de fond). B. PL76 - Prélèvement à la pince du HROV Ariane d'un petit bloc rocheux avec du corail jaune. C. PL72 - Petite colonie de cérianthes par 330 m de fond sur une ravine. D. PL74, Faune benthique colonisant des strates indurées (site "Roche du doigt mordu") par 90 m de fond. E. PL73, Habitat Mégafaune fouisseuse EUNIS A5.362 (galathée par 175 m de fond). Prélèvement d'échantillons biologiques à l'aspirateur à faune (F) ou à la pince (G) pour identification.
Résultats majeurs partie Polluants
Ce travail a permis d'acquérir de nouvelles connaissances sur la pollution marine issue des activités anthropiques dans le Canyon sous-marin de Capbreton, une zone de transfert de matériel particulaire du continent vers l'océan profond. Un état des lieux a été réalisé sur la présence de micropolluants prioritaires et émergents dans les sédiments des 25 premiers kilomètres de ce canyon. Les sédiments prélevés (Figure 3) dans le canyon présentaient des concentrations de micropolluants plus importantes que dans les sédiments prélevés sur le plateau continental suggérant que le canyon est à la fois un piège à particules et à micropolluants. La détermination des sources par des outils isotopiques a démontré une forte contribution d'apports provenant des effluents côtiers pour les zones proches de la côte et une contribution d'apports pélagiques pour les zones plus éloignées. La réactivité de certains micropolluants émergents et du mercure a été examinée par des expériences en conditions contrôlées afin d'identifier les processus de transformation et les bactéries impliquées. La dégradation des micropolluants émergents est lente en condition anoxique et bien plus rapide en condition oxique. La capacité de dégradation observée pour des bactéries isolées de ces sédiments suggère leur potentielle implication dans les processus de biorémédiation des micropolluants organiques dans le milieu marin. Les potentiels de méthylation et de déméthylation du mercure ont montré une forte biométhylation dans les sédiments côtiers anoxiques, associée à des bactéries du cycle du soufre notamment (Figure 6). Ces travaux confirment que le canyon de Capbreton, comme certainement d'autres canyons sous-marins, sont des zones importantes en terme de processus de transfert et de transformations des micropolluants.
Figure 6. Exemple de processus de transfert et de transformations du Mercure aux abords du canyon de Capbreton
Résultats majeurs partie Géosciences
Quatre sites distincts ont été visités au cours des cinq plongées d'une durée de 3 à 6 heures (Figure 1). Toutes les plongées ont commencé dans le thalweg du canyon ou dans la pente moyenne à des profondeurs allant de 450 à 200 m. Le HROV a ensuite exploré le fond et/ou les pentes, remontant jusqu'au bord du canyon, et terminant les plongée à des profondeurs de l'ordre de 100 m de profondeur. Avec le dépouillement des données vidéo et photo de ces plongées grâce au logiciel Adélie, puis avec l'analyse en laboratoire des échantillons de roches prélevés, les principaux résultats de géosciences obtenus à la suite de la mission sont les suivants :
(1) Mise en évidence de la présence d'une couche turbide au-dessous du fond du thalweg (axe du canyon) sur une épaisseur allant de 50 à 100m (Figure 7). Du fait de l'apparente persistance de cette couche turbide, mise en évidence également par les plongées de la mission technique ATLANTHROV qui avait devancée HaPoGé d'un mois, la mise en suspension de ces sédiments fins dans la colonne d'eau depuis le fond est plutôt à rattacher à l'action des ondes internes (onde de marée semi-diurne) qu'au passage de très épisodiques courants de turbidité. La présence systématique de cette couche turbide, réduisant la visibilité à quelques décimètres, a malheureusement complétement empêché la reconnaissance et description des bedforms sur le fond du thalweg.
Figure 7. A. Couche turbide dans la colonne d'eau surplombant le thalweg telle que vue depuis la caméra de navigation du HROV Ariane. B. Représentation de l'emplacement de cette couche turbide sur le fond du canyon (partie amont).
(2) Caractérisation de la morphologie et de la nature du substrat physique dans les pentes latérales du canyon. Les pentes douces et mamelonnées lissées par la sédimentation hémi-pélagiques dominent le paysage sous-marins (Figure 8.A). Cependant, des reliefs beaucoup plus abrupts ont été décrits : ravines encaissées aux crêtes d'interfluves acérées (Figure 8.B), affleurements sub-verticaux et frais pouvant correspondre à des cicatrices de glissements récents. Dans ces pentes, deux types de substrats sont rencontrés: les vases intensément bioturbées des pentes douces versus les tombants verticaux rocheux colonisés par des organismes fixés (éponges encroutantes, bryozaires, bivalves, ...).
Figure 8. A. Aspect typique de la morphologie des pentes latérales du canyon : pentes douces et vaseuses intensément bioturbées. B. Relief abrupt d'une crête interfluve entre deux ravines.
(3) Caractérisation des affleurements rocheux du haut de pente et du rebord du canyon. L'ensemble des échantillons prélevés sont des grès fins à moyens mixtes silico-clastiques/bioclastiques à ciments carbonatés (Figure 4). Ils sont intensément colonisés par des organismes fixés. Trois morphologies sont décrites : des champs de blocs et rochers (sur le rebord de plateau)(Figure 9.A); des bancs de grès subhorizontaux anispopaque (~1m) à interbancs argileux métriques (Figure 9.B); des formes verticales colonnaires en interbancs ou isolées (Figure 9.C), parfois ramifiées (Figure 9.D), de diamètre décimétrique à pluridécimétrique. Les analyses à terre de ces échantillons ont inclus du microfaciès lithologique en lame minces, de la cathodoluminescence, des analyses XRF, de la calcimétrie et de l'isotopie des carbonates (rapports Delta18O et Delta13C). La morphologie de certains échantillons évoque sans ambiguïté des encroutements et conduits authigéniques de suintements froids. Résultat marquant de cette étude, les analyses isotopiques confirment que le ciment de ces grès est, au moins en partie, d'origine authigénique avec une signature de type MDACs (Methane Derived Authignenic Carbonates).
Figure 9. Trois types de morphologie d'affleurement rocheux du haut de pente et du rebord du canyon : champs de blocs et rochers A), bancs de grès subhorizontaux anispopaque (B) et formes verticales colonnaires en interbancs (C), ou isolées et ramifiées (D)