Les deux tiers de la surface terrestre et plus de 90 % des limites tectoniques actives connues des plaques où se produisent les mouvements des plaques sont immergées. Cependant, en raison de la difficulté pour surveiller et mesurer les déplacements des fonds marins, les connaissances sur les processus actifs le long des limites des plaques sous-marines et sur les risques naturels associés (tremblements de terre, tsunamis), ou sur les mouvements du sol liés aux activités humaines (pompage pétrolier) sont limitées. Ces déplacements peuvent se produire de façon continue à l'échelle du millimètre ou du centimètre sur plusieurs années (e.g. une faille rampante), ou de manière instantanée à l'échelle du mètre ou de plusieurs mètres (e.g. une faille de rupture).
A terre, ces 20 dernières années ont vu de grands progrès dans notre compréhension des failles, des glissements de terrain et des volcans, grâce aux avancées technologiques pour mesurer avec une haute résolution des déformations du sol. La corrélation optique (e.g. Michel & Avouac, 2002), le radar interférométrique différentiel à ouverture synthétique (DInSAR, e.g., Delacourt et al., 2009), le système de positionnement global différentiel (DGPS, e.g., Segall & Davis, 1997 ; Dzurisin, 2003) fournissent des informations presque directes sur l'énergie de la déformation qui s'accumule le long des parties verrouillées des failles actives et qui peut être libérée par un tremblement de terre important, le mouvement des plaques, l'inflation et la déflation d'un volcan.
La capacité de détecter et de surveiller les structures tectoniquement actives des fonds marins avec une telle résolution reste un véritable défi. Comme les ondes électromagnétiques ne se propagent pas dans l'eau, la transposition des techniques terrestres sous l'eau n'est pas possible. La seule approche consiste à déployer des capteurs sur le fond pouvant communiquer par acoustique avec un navire de surface ou câblés jusqu'au rivage. En outre, ces capteurs doivent résister à des conditions extrêmes (pression, corrosion) et être alimentés sur une longue durée. La maintenance de ces équipements et la récupération des données nécessitent alors des campagnes répétées, ce qui rend l'approche difficile et coûteuse à mettre en oeuvre, en particulier en haute mer. Par conséquent, la surveillance de la déformation des fonds marins est généralement effectuée depuis la terre à l'aide de capteurs terrestres, offrant une faible résolution sur les mouvements des fonds marins éloignés du rivage, ou utilise des capteurs sous-marins câblés, qui nécessitent des infrastructures très coûteuses sur des sites appropriés (e.g. l'observatoire câblé Neptune au large du Canada).
Surmonter ces défis en domaine marin ouvrirait pourtant de nouveaux champs de découvertes et de possibilités pour toute une série d'applications, notamment la géodésie mondiale, les études géodynamiques, l'évaluation des risques naturels et industriels. Le long des failles sismogéniques actives, où les taux de déplacement sont relativement faibles (quelques millimètres à quelques centimètres par an), plusieurs années d'acquisition de données géodésiques seront nécessaires pour caractériser ces déplacements, ce qui démontre l'urgence de commencer ces mesures dans des zones à haut niveau de risque sismique. Par exemple, le risque sismique dans les zones de subduction ou de glissement a souvent été calculé sur la base de la sismicité historique, de la vitesse de déplacement des plaques et de la taille estimée de la zone sismogénique. Aucun de ces paramètres ne fournit d'informations quantitatives sur le couplage des plaques et l'accumulation de contraintes qui provoquent les méga-séismes et aucun d'entre eux ne permet de prévoir les méga-événements de Sumatra en 2004 ou du Japon en 2011.
L'objectif du projet GEODESEA était de tester et d'améliorer des méthodes innovantes de positionnement géodésique absolu marin.