Le Leg1 (Bathymétrie et sonar latéral) s'est déroulé conformément au plan de campagne. Le programme du Leg 2 (vibrocarottage) s'est vu perturbé par l'incapacité du carottier Zenkovitch à pénétrer dans le sable et par les aléas météo (fin de Leg 2).
Les données issues du Leg 1, combinées aux données des missions précédentes, ont contribué à profondément réviser notre conception de la dynamique sédimentaire sur le plateau aquitain et la zone proximale du canyon de Capbreton.

1. Résultats sur le plateau aquitain

Sur le plateau aquitain, les résultats issus des missions SEDYMAQ 1 (2008), SEDYMAQ 2 (2010) et SEDYMAQ 3 (2012) peuvent être résumés aux points suivants :

• Sur le plateau médian et interne, à l'exception des objets de petites tailles (rides et mégarides d'oscillation), la couverture sédimentaire superficielle se révèle stable à l'échelle pluri- décennale (période 1980-2008) (Gillet et al., 2009).
• Sur le plateau interne, la description de la couverture superficielle "palimpseste" telle que défini par (Cirac et al., 2000) a pu être précisée (Figure 1). Du concept de placages sableux discontinus simplement posés sur un substrat grossier, nous sommes passés au concept de sorted bedforms (corps issus d'un processus de tri sédimentaire rétroactif) pour lesquels nous avons démontré une imbrication, et non plus une superposition, des sédiments fins et grossiers (Mazières, 2014; Mazières et al., 2015).
• Sur le plateau interne, le stock sableux superficiel tend à migrer doucement vers la côte au cours du temps sous l'effet combiné des houles et de pulses épisodiques de courants. Les vitesses de déplacement mesurées différent selon la taille des objets sédimentaires. Ainsi, les sorted bed forms (extension décamétrique à kilométrique et épaisseur métrique) peuvent migrer à des vitesses de l'ordre de 5 à 10 m/an, alors que les vitesses de migration des dunes hydrauliques (longueur hectométrique) atteignent 30 m/an (Mazières, 2014; Mazières et al., 2015)(Figure 2).

Figure 1 : A, Mosaïques sonar latérales levée sur la zone de la Salie-Biscarrosse lors des missions SEDYMAQ 2 et 3 ; B, interprétations de ces données ; C, mégarides d'oscillations ; E, F, G : faciès sédimentaires échantillonnés.

Figure 2 : Exemple de migration rapide de dunes hydrauliques sur la zone de Biscarrosse entre 2010 et 2012.

Les données récoltés sur le plateau aquitain au cours du programme SEDYMAQ ont été valorisées au travers de la thèse d'Alais Mazières (Mazières, 2014) et de plusieurs stages de Master (Darsaut, 2011; Gehin, 2009; Schmidt, 2012).
Ces travaux ont été publiés (Mazières et al., 2015), présentés en congrès (Cirac et al., 2009; Gillet et al., 2009; Mazières et al., 2011; Mazières et al., 2014b; Mazières et al., 2013c; Sterckeman et al., 2009) et valorisés au travers de la réalisation d'une carte de la couverture sédimentaire superficielle du plateau aquitain (Cirac et al., 2016).

2. Résultats sur la tête et la partie proximale du canyon de Capbreton

Le canyon de Capbreton se caractérise par sa très profonde incision du plateau continental (jusqu'à 200 m du rivage)(Cirac et al., 2001). Bien qu'il soit déconnecté du fleuve Adour, l'axe du canyon est aujourd'hui soumis à des écoulements turbiditiques (Gaudin et al., 2006; Mulder et al., 2012; Mulder et al., 2001; Salles et al., 2008) dont la fréquence est d'environ 1/an pour les derniers 2000 ans (Brocheray et al., 2014).

Sur le canyon de Capbreton (tête et partie proximale, entre 10 et 300 m de fond), les données du programme SEDYMAQ, ont également été analysées et valorisées dans le cadre de la thèse d'Alais Mazières (Mazières, 2014) et de trois stages de Master (Guyot, 2010; Moreau, 2009; Roussey, 2014). Ces travaux ont été publiés (Mazières et al., 2014a), présentés en congrès (Gillet et al., 2013; Gillet et al., 2015; Mazières et al., 2013a; Mazières et al., 2013b; Roussey et al., 2014) et dans le cadre d'une manifestation grand public (Gillet, 2015).

Sur la tête du canyon (entre 10 et 100 m de profondeur), de ces travaux, nous retiendrons les résultats majeurs suivants (Gillet et al., 2013; Mazières et al., 2014a):

• Entre 1998 et 2012, la tête du canyon a été le siège d'une dynamique morphologique et sédimentaire exceptionnelle. La comparaison des time-lapse bathymétriques a montré, que sur cette période, le fond de la tête du canyon a été considérablement remanié par de nombreux cycles d'érosion et de comblement (Figure 1.A). La forme et la position générales de la tête restent cependant stables et son fond semble osciller autour d'une position d'équilibre (Figure 3)
• Nous avons également démontré que la tête du canyon fonctionne comme une zone de stockage temporaire qui reçoit épisodiquement (conditions de houles fortes) les sables de la dérive littorale aquitaine avant de les transférer vers l'aval dans le canyon et dans alimenter l'activité turbiditique.
• Morphologiquement, la tête du canyon est caractérisée par la présence Crescent Shaped Bedforms dont la longueur d'onde augment vers l'aval. Ces bedforms apparaissent comme une probable signature de ce processus de transferts mais leur origine, comme dans le canyon de Monterey, reste sujet à débat (breaching, cyclic steep, ect.).

Juste à l'aval de la tête, la partie proximale du canyon (entre 100 et 300 m de profondeur) témoignent d'une activé actuelle dont l'intensité avait jusque-là était sous-estimée (Gillet et al., 2015). Sur cette zone proximale, nous retiendrons les résultats suivants:

• Le canyon présente également ici une évolution morphologique intense au cours des 18 dernières années. Si ses flancs sont restés peu impactés (pas de grands glissements latéraux sur la période considérée), l'axe du canyon, comme sa tête, a été remarquablement remanié.
• À l'axe du canyon, des périodes à fond "plat", suggérant un comblement partiel du thalweg, sont suivies des périodes à fond "sur incisés" (terrasses latérales "témoins" et thalweg axial étroit), suggérant un retour au profil d'équilibre après ce comblement partiel.
• Ces sur-incisions se créent par érosion régressive et se manifestent par le recul de plusieurs knickpoints avec des vitesses de l'ordre de 100 à 200, voir 300 m/an.
• Le prélèvement d'une carotte sédimentaire sur l'une de ces terrasses "témoins" montre qu'elle pourrait résulter d'un seul événement gravitaire sableux.

Ceci suggèrent que la sédimentation dans la partie proximale du canyon est marqué par le comblement partiel et épisodique de son thalweg par des masses sableuses écoulées depuis la tête, masses sableuses ensuite ré- incisées à la faveur du retour au profil d'équilibre (recul de knickpoints).

Figure 3 : Évolution morphologique de la tête du canyon de Capbreton entre 2001 et 2012.